vendredi 26 avril 2019

Entretien du 18 novembre 1980 (Conscience et Absolu)



Maharaj : A présent ma perspective est sans limite, c’est la liberté totale.
A la fin, on doit aller au-delà de la connaissance, mais il faut d’abord qu’il y ait une connaissance, et elle vient d’une méditation constante. Quand on médite, le « Je suis » s’apaise et se fond dans la connaissance universelle ; il perd ses entraves, devient libre comme le ciel, l’espace.
Ceux qui viennent ici pour acquérir une certaine connaissance, même spirituelle, le font en tant qu’individus qui cherchent quelque chose pour eux-mêmes ; mais c’est là qu’est le problème, car le chercheur lui-même doit disparaître.
Quand vous connaissez votre vraie nature, la notion de « Je suis » persiste, mais elle perd ses limites. Il ne vous est pas possible d’acquérir la connaissance, car vous êtes connaissance. Ce que vous recherchez est déjà là, c’est vous.
Votre être véritable existe avant tout concept. Vous, si vous n’étiez qu’un objet, comment pourriez-vous comprendre ce qui était avant que le concept n’apparaisse ? Sans la conscience, comment peut-on établir l’existence de quoi que ce soit ? La conscience elle-même est le mental, la pensée ; elle est tous les phénomènes, toute la manifestation. Quand on comprend tout cela, on n’est plus, de son vivant, le « Je suis ce corps ». On ne saisit cela que très rarement, c’est quelque chose d’intangible, aucun effort n’est nécessaire ; en fait, l’effort lui-même est l’obstacle. C’est une intuition directe.
Question : Alors est-ce qu’on devrait abandonner toutes les disciplines spirituelles ?
M : Au plus haut niveau, certainement ; mais avant, il faut un travail préparatoire.
Ceux qui ont cette intuition perdent tout intérêt aux affaires de ce monde. Après, qu’est-ce qu’il leur arrive ? Ce qu’ils ont perdu, ils l’ont perdu en tant qu’individu ordinaire, mais ce qu’ils ont gagné est royal. Ceux qui ont saisi et ont atteint un certain niveau ne demandent plus rien, et tout leur est donné. Ils ne le veulent même pas, et pourtant tout leur est offert.
Cela n’arrive pas à un individu - cela arrive à la manifestation universelle, à celui qui n’est plus que sa nature véritable. Le Jnani n’est plus qu’un témoin.

Extrait de Conscience et Absolu, Editions Les Deux Océans 1997

lundi 22 avril 2019

Entretien du 14 mai 1980 (Conscience et Absolu)


Maharaj : Les docteurs ont établi que ce corps a le cancer. Qui d’autre que moi pourrait éprouver autant de joie après une telle nouvelle ? Le monde est fait de votre expérience directe, de votre observation. Tout se passe à ce niveau, mais je ne suis pas à ce niveau. Je n’ai plus d’association avec sattva guna(l’être dans la détermination).
On a atteint l’Etat Ultime de la spiritualité quand il n’y a plus de besoins, jamais, quand rien ne sert plus à rien. Cet état s’appelle Nirvana, Nirguna(libération, l’être sans attribut ou qualité), il est Vérité Ultime, Eternelle. L’essence et la quintessence de tout cela s’appelleSat-guru Parabrahman, l’En-soi Absolu suprême, l’état qui n’a besoin de rien d’autre.
Après la dissolution de l’univers, il n’y a même plus trace de la création, et ce qui reste est l’état parfait. Je (Absolu) suis resté immuable, alors même que l’univers était créé et retournait au néant. Je n’ai pas encore parlé de ça : mon état n’a jamais senti ni la création ni la disparition de l’univers. Je suis le principe qui survit à toutes les créations et toutes les dissolutions. C’est mon état, et le vôtre aussi, mais vous ne le savez pas parce que vous êtes attaché à votre être-moi. On le réalise seulement quand la foi invincible est là, cet éternel Sat-guru Parabrahman. Il est là, il est toujours là, il est la propriété éternelle de celui qui suit son Guru.

Extrait de Conscience et Absolu, Editions Les Deux Océans 1997

jeudi 11 avril 2019

Entretien du 11 juin 1981 (matin) (A la Source de la Conscience)


Maharaj : C’est seulement lorsque l’identité avec le corps-intellect sera totalement rejetée et l’identité avec la seule conscience fermement établie, que, ce que je vous dis prendra sa pleine signification. Vous êtes l’illimité, l’illimité n’est pas perceptible aux sens. En vous limitant à un corps vous vous êtes exclus du potentiel illimité que vous êtes en réalité.
Dans la méditation, la conscience médite sur elle-même et demeure au cœur d’elle-même.
Si vous acceptez ce que je vous dis, vous ne pourrez plus être volontairement associé à ce qui se produit spontanément dans le monde. Vous ne pourrez plus être concerné, ni par les causes, ni par les effets et c’est alors que vous accepterez votre véritable nature. Toute activité traversant le corps se produira spontanément, indépendamment de ce que vous êtes réellement. 
Souvenez-vous que lorsque cette force vitale – combinaison du souffle et de la conscience – quittera le corps, elle ne demandera la permission à personne. Elle est venue spontanément, elle partira de même et c’est tout ce qu’il y a à dire sur ce qui est appelé mort. Il n’y a personne qui soit né, personne qui soit mort. 

Visiteur : Tel que je le comprends, le but de la vie est simplement de permettre une pleine compréhension de ce qui a été manifesté et du fonctionnement de la conscience universelle. En dehors de cette compréhension, rien ne peut être fait !

M. : C’est bien cela. Tout est spontané, automatique, naturel, la seule limitation est ce « moi », ce « mien.
Quand des gens simples comme vous, sont ici, je suis en paix, à l’aise. Mais quand viennent certains, se prétendant sages réalisés, fiers de leurs connaissances et souhaitant en faire parade ici, il y a alors de l’agitation.

Un autre visiteur : Tout ceci est d’une spiritualité élevée, c’est d’un très haut niveau. Que doit faire un homme simple en attendant de pouvoir l’absorber ?

M. : Du moment qu’il y a ouverture et un profond désir de comprendre, vous n’avez rien à faire. Cette connaissance produira ce qui a besoin de se produire. Ce qui est demandé n’est pas un certain calibre mental ou culturel mais le sens intuitif de la discrimination. 
Donc à présent vous le savez, vous n’êtes pas le corps. Ayant assimilé cela, pouvez-vous continuer à vous identifier à ce corps ?

V. : Est-ce que l’esprit et le corps ont une importance ?

M. : Tout a son importance.

V.: Ne doit-on pas s’occuper du corps ?

M. : Si je suis identifié à quelque chose je veux m’en occuper, mais vous n’avez plus rien à voir avec ce corps à présent ... alors pourquoi vous inquiéter de savoir ce qu’il faut en faire ?
Quand vous n’êtes plus le corps vous êtes l’espace, vous êtes tout ce qu’il contient. Vous êtes à présent le manifesté, tout ce qui existe. Cet espace est connu par Chidakash (l’aspect connaissance de Brahman). Quand vous êtes Chidakash vous êtes plus subtil que l’espace physique, il a plus d’expansion. Un Sage Réalisé transcende tous ces stades différents, ces subtilités : ciel, espace, etc...
Dans Chidakash il demeure confiné, conditionné à penser « Je suis ». Le stade suivant est Paramakash (hors temps et espace). Paramakash est le plus haut, contenant lui-même sept autres akashas. Dans le Chidakash cette connaissance est « Je suis ». Dans Paramakash ne se trouvent, ni « est », ni « n’est pas ». Tout est transcendé ! 

A la Source de la Conscience, Editions Les Deux Océans, 1991